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Soudain,
et sans qu'elle sache comment elle était arrivée là, Anouna
vit se dresser à l'horizon la silhouette de trois pyramides,
ces escaliers symboliques ayant pour fonction de permettre
aux défunts de monter vers les cieux.
Elle détestait cette vallée jalonnée de tombeaux en ruines
où maraudaient perpétuellement les voleurs en quête de mauvais
coup. Depuis toujours, les pyramides - les châteaux d'éternité
selon la terminologie des prêtres - se dressaient orgueilleusement
à l'orée du désert… et depuis toujours les violeurs de sépultures
s'infiltraient en elles, lézards rusés, malfaisants. Anouna,
en fille razziée dont la vie s'était en grande partie
déroulée au milieu des bandes de pillards, devinait que les
riches faisaient fausse route en adoptant ce type de tombeau.
Il aurait fallu au contraire abandonner toute pompe, toute
gloire, se passer de bijoux d'or, de pierres précieuses, pour
s'enterrer dans de simples cavernes sans apparat. N'emporter
avec soi que des objets ordinaires, frustres, sans incrustations
de nacre. Partir pour l'au-delà avec le simple bagage d'un
fellah, d'un paysan du Nil. Dès lors, quel intérêt auraient
eu les violeurs de sépultures à se glisser dans les tombes
royales et à défier les pièges disséminés au long des galeries
? Pourquoi courir tant de risques pour un butin ne comptant
que quelques jarres de terre cuite, des figurines de bois
peint et trois pagnes de rechange en lin grossier ?
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