La maison du sommeil
                Jonathan Coe

  Gallimard
  1998
  426 pages
Note : 17/20

Dans la clinique du sommeil, une ancienne pension d'étudiants, règne une atmosphère étrange et pesante. Peut-être parce que la demeure est trop empreinte des souvenirs du passé ? Il y a dix ans s'y sont croisés 5 étudiants au profil psychologique plutôt tourmenté... en particulier Sarah, une narcoleptique souvent incapable de faire la différence entre ses rêves et la réalité. Leurs chemins se sont séparés mais chacun d'eux a conservé en mémoire le souvenir de cette époque.
Désormais, dans cette demeure, on soigne les troubles du sommeil et le Dr Dudden, qui a de grandes ambitions, prépare avec ferveur sa prochaine expérience. Le plus étrange, c'est que les destins de ces 5 personnes vont à nouveau se croiser ici, à Ashdown... Mais qui sait, peut-être est-ce là la clé de leur quête existentielle pour eux encore si perturbés...
En pénétrant dans l'étrange univers de cette maison du sommeil, on ne peut qu'être hypnothisé par le parcours des différents protagonistes. Très fortement empreint d'analyse psychanalitique et d'interprétation de rêves, on est très vite emmené dans l'introspection des personnages et leur quête de de personnalité. Qui plus est, le récit est construit sur l'alternance de faits présents et passés. Ce type d'écriture donne un très bon rythme à l'histoire et permet de garder le lecteur en haleine. Alors, contrairement à d'autres romans, avec “La maison du sommeil”, vous ne risquez pas de vous endormir !

Enorme, grise et imposante, la propriété d'Ashdown se dressait sur un promontoire, à une vingtaine de mètres de la falaise à pic, qu'elle surplombait depuis plus d'un siècle. Toute la journée, les mouettes tournoyaient autour de ses flèches et de ses tourelles, avec des gémissements stridents. Jour et nuit, les vagues se brisaient furieusement contre la paroi rocheuse, et résonnaient comme un grondement de camions dans les salles glaciales et le dédale de couloirs de la vieille bâtisse. Même les recoins les plus vides d'Ashdown - qui était désormais presque entièrement vide - n'étaient jamais silencieux. Les pièces les plus habitables se concentraient frileusement au premier et au deuxième étage, face à la mer, et dans la journée un froid soleil les inondait. La cuisine, au rez-de-chaussée, était longue, en forme de L, avec un plafond bas ; elle n'avait que trois fenêtres minuscules, et était constamment plongée dans l'ombre. La beauté sinistre et arrogante d'Ashdown masquait le fait qu'elle était profondément inadaptée à toute présence humaine. Ses plus anciens et plus proches voisins se rappelaient vaguement, mais sans tout à fait y croire, qu'elle avait été jadis une résidence privée, demeure d'une famille réduite à huit ou neuf membres. Mais vingt ans plus tôt elle avait été acquise par la nouvelle université, et elle abritait à présent deux douzaines d'étudiants : population nomade, aussi changeante que l'océan qui grondait à son pied, en déployant jusqu'à l'horizon les inlassables moutonnements de son vert maladif.

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