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La ville de nulle part, c'est Los Angeles, une ville
où n'existe ni le passé ni l'avenir, où seul un présent irréel et discontinu
se déroule sans laisser de traces ni de perspectives.
C'est une ville où, dans cette Amérique des années 60, l'on croise des
beautés beatniks telles que Cécile qui vous emmènent à la découverte de
ce nouvel art de vivre. C'est aussi une ville où l'on peut partir à la
découverte de soi-même par la transgression des tabous...
Il y a eu Les chroniques de San Francisco,
"La ville de nulle part", c'est un peu les "Instantanés de Los Angeles"
: portrait sans contrainte d'une ville sans complexe.
Mais ce roman, c'est aussi et surtout l'histoire de Paul et Katherine,
deux êtres si différents qu'on se demande bien ce qu'ils font ensemble.
Fraîchement débarqués de la Nouvelle-Angleterre, ils sont loin d'avoir
la même vision de Los Angeles. Paul s'y sent comme un poisson dans l'eau
tandis que Katherine, grincheuse perpétuelle semble-t-il, mène un combat
quotidien contre une sinusite chronique. Le problème est qu'elle, la fille
de l'est, déteste cette ville ; tout lui semble si factice et détaché
du temps. Elle donnerait n'importe quoi pour rentrer en Nouvelle-Angleterre
tandis que Paul se voit déjà en train d'habiter Venice, le quartier des
beatniks.
Mais le plus méchant des deux n'est pas celui qu'on croit...
« Kathy »
fit Paul, en lui passant les bras autour de la taille. Il l'attira sur
sa poitrine. « Ne te fais pas tant de soucis. Ce n'est qu'une ville
comme une autre.
- Non, c'est faux. C'est une ville qui ne ressemble à aucune autre. Pense
à ces espèces de monstres que nous avons vus à l'aéroport, ces petites
filles habillées en femmes, cette vieille aux cheveux orange, cet homme
qui n'avait pratiquement sur lui qu'un slip de bain. Et les maisons. Tous
est si exagéré, si artificiel. Je n'aime pas ces lis, enfin ces fleurs
qu'on cultive à cette époque de l'année, ni ces pêches. J'aurais peur
d'en manger une, vraiment.» Elle rit.
« Tu es sotte. Tu viens juste d'arriver» protesta Paul.«
Tu n'as encore presque rien vu de Los Angeles. Tu ne devrais pas avoir
tant de préjugés. Il ne faut pas te laisser influencer par la réputation
qu'on a faite à la Californie dans l'Est. Los Angeles est une ville comme
les autres. Des milliers de gens y vivent et y travaillent normalement.
- Eh bien, eux aussi me font peur» , dit-elle, à moitié sérieusement
cette fois. « Je pense au moment où je devrai faire leur connaissance
et où ils me regarderont tout en disant : Qui est-ce ? Quelle est sa raison
d'exister ? Pour toi, ça n'est pas la même chose. Tu as une raison d'être
ici : tu as un job, un bureau, quelque chose à faire. Moi, ici, je ne
suis rien. Personne ne me connaît, personne ne veut de moi et je suis
vraiment un peu nerveuse.» Elle rit encore, mais sans joie ; il faisait
trop sombre à présent pour que Paul vît son visage.
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