Autobiographie d'un amour
                Alexandre Jardin

  Gallimard
  1999
 
Note : 17/20

Aimer pour mieux s'aimer soi-même, pour mieux supporter sa propre existence . . . tel est le quotidien d'Alexandre Rivière. Comment peut-on alors rendre l'autre heureux ? Face au désespoir de sa femme, Alexandre prend subitement conscience de tous ses problèmes mais le temps et la lassitude ont déjà fait leur oeuvre. Jeanne ne peut plus, alors Alexandre fuit.
Quelle n'est pas sa surprise lorsqu'elle voit réapparaître, deux ans plus tard, le frére jumeau d'Alexandre, Octave. Un identique mais qui représente l'homme qu'elle a toujours attendu et désiré aimer. Un Alexandre sans ses défauts mais avec toutes ses qualités. Le piège est trop facile et Jeanne s'y laisse prendre avec délectation tandis qu'Octave, tout en la faisant renaître, s'obstine à ne pas la désirer. Il dit être un homme comme les autres (là où Jeanne découvre un être exceptionnel) et cacher de nombreux défauts dont elle ne manquerait pas de souffrir.
Et le doute est toujours là, lancinant : qui est véritablement cet homme, Octave ou Alexandre ?
Cet habile jeu de cache-cache est magnifique. Il apprend à tous les amoureux à reconsidérer leur façon d'aimer car en aimant l'autre, ne sommes-nous pas tous un peu à la recherche de nous-même ? En utilisant les préceptes de Jacques Salomé, Alexandre Jardin montre à travers ce roman bouleversant que le dialogue, l'écoute de l'autre et la renaissance de soi peuvent être la solution aux maux des couples en perdition.

Octave savait qu'il ne s'échapperait de ses propres peurs qu'en libérant Jeanne des siennes ; car il était clair que, par un étrange jeu de miroir, cette femme lui renvoyait très exactement l'image de ses propres limites, celles qui le révoltaient le plus. Etait-elle dominée par une mère tutélaire ? Elle n'était pas la seule... Un rien - la découverte de sa surdité du côté droit - pouvait-il fragiliser la mince confiance qu'elle avait dans son attrait ? C'était aussi son cas. Rivière était au fond convaincu de son insuffisance, qui le rendait inapte à mériter la moindre attention d'une fille. L'exaspération qui le gagnait lorsque Jeanne se pourrissait la vie avec méthode n'était que l'écho des paniques extraordinaires qui l'asphyxiaient quand il se surprenait à compliquer son propre sort, à saboter son quotidien en s'interdisant par exemple de ressentir du plaisir. Il étouffait de rage d'être coincé dans un naturel aussi peu enclin à la satisfaction, de se voir soumis à un tempérament de forcené qui le portait à se projeter toujours en avant plutôt que de jouir des fééries de l'instant. Soigner Jeanne d'être elle-même était pour Rivière une façon de se soulager de n'être que lui-même.

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